Nicolas Mathieu: Connemara
Übersetzt aus dem Französischen von Lena Müller und André Hansen
Zweisprachige Leseprobe

Avant de décamper, Christophe resta un moment dans sa caisse, à tirer sur sa clope sans bouger, une vitre entrouverte, profitant du calme, de l’obscurité, de l’air du soir qu’alourdissait un reste d’humidité. Au loin, un point lumineux clignotait, signalant la haute cheminée de l’usine de pâte à papier, le plus gros employeur de Cornécourt. C’est là que bossait Greg. Enfin de moins en moins depuis qu’il avait réussi à se faire élire au comité d’entreprise. Norske Tre avait d’ailleurs essayé de le lourder à plusieurs reprises, au motif qu’il passait ses heures de délégation au bistrot. Greg aimait bien raconter les convocations et les lettres avec accusé de réception, ça le faisait marrer. Son optimisme avait quelque chose d’assez mystérieux quand on pensait à la manière dont il vivait, célibataire, endetté à mort et même pas le permis. Au dernier réveillon, il s’était pointé en costard et santiags, avec trois cartons de Mumm. Vu l’état de ses finances, c’était limite kamikaze. Mais Greg n’en avait rien à foutre. Son père était mort jeune, diabétique et accro au paris-brest. Lui-même picolait pas mal et fumait deux paquets de Camel par jour. Dans la vie, il ne fallait pas s’en faire.

Puis Christophe se décida tout de même à y aller, et chercha sur l’autoradio une chanson pour l’accompagner sur la route. Souvent, quand il roulait comme ça et reprenait les rues archi-connues de cette ville où il avait grandi, aimé et déjà vieillissait, il appréciait de se laisser porter par un de ces vieux tubes sans noblesse qui passent sur la bande FM. Il n’y avait personne dans les rues, les lampadaires ponctuaient sa trajectoire, et peu à peu, il sentait monter les grands sentiments que procurent les paroles gravées des titres entendus quand on est môme. Alors il se laissait prendre. Johnny, qu’il avait longtemps méprisé, lui trouait le cœur à présent. Il chantait les coups du sort, les hommes en morceaux, la ville, la solitude. Le temps qui passe. Une main sur le volant, sa clope électronique dans l’autre, Christophe refaisait l’histoire, un mec tout seul avec ses souvenirs. Les abribus où il avait perdu la moitié de son enfance à attendre les transports scolaires. Son ancien bahut, les kebabs qui avaient fleuri dans tous les coins, la patinoire où il avait connu ses meilleurs moments, les ponts d’où il avait craché dans la Moselle pour tromper son ennui. Les PMU, le McDo et puis le vide des courts de tennis, la piscine éteinte, le lent glissement vers les zones pavillonnaires, la campagne, le rien.

Ce soir-là, il tomba sur Les Lacs du Connemara et revit sa mère dans son tablier à fleurs, occupée à écosser les petits pois un dimanche matin, Sardou à la radio pendant qu’il dessinait un château fort, et le printemps par la fenêtre. Puis le mariage de sa cousine, quand il avait vomi derrière la salle des fêtes, une méchante cravate nouée autour de la tête, colorent la terre, les lacs, les rivières. Son père l’avait ramené à l’aube et, au feu rouge, lui avait dit tu fais le grand 8 on dirait. À vingt ans, le même Tam tatam tatatatatam dans une boîte de nuit située aux abords de Charmes, la fumée des Marlboro et Charlie dans l’éclat brumeux des lumières rose et bleu, avant de retrouver le froid piquant des parkings et le retour mortel des voies rapides. Dix ans plus tard au bistrot, sept heures du matin et la voix en sourdine du chanteur tandis qu’il prenait un café au comptoir, la fatigue lourde sous les yeux, à se demander où il trouverait le courage pour venir à bout de cette autre journée. Puis à quarante ans pour finir, un soir de réveillon après avoir déposé le petit chez sa mère, la voix qui scande autour des lacs, c’est pour les vivants, et lui tout seul au volant, ne sachant même pas où dîner ni avec qui, en être là au bout du compte, le cheveu plus rare et sa chemise serrée à la taille, surpris de cette sagesse de vieillard qui, à l’improviste, sur cette chanson roulant son héroïsme de prospectus, le cueillait dans une bagnole qui n’était même pas à lui. Christophe pensa à cette fille qu’il avait voulue à tout prix, et qu’il avait quittée. À ce gosse qui était tout et pour lequel il ne trouvait jamais le temps. Le sentiment de gâchis, la lassitude et l’impossible marche arrière. Il fallait vivre pourtant, et espérer malgré le compte à rebours et les premiers cheveux blancs. Des jours meilleurs viendraient. On le lui avait promis.

Nicolas Mathieu: Connemara. Actes Sud, 2022, S. 51–52.

Bevor er sich aus dem Staub machte, blieb Christophe noch einen Moment lang in seinem Auto sitzen, zog reglos an seiner Zigarette, das Fenster leicht geöffnet, und genoss die Ruhe, die Dunkelheit, die feuchtschwere Abendluft. In der Ferne blinkte ein Leuchtpunkt und markierte den hohen Schornstein der Papierfabrik, des größten Arbeitgebers von Cornécourt. Dort arbeitete Greg. Nicht mehr so viel, seit er in den Betriebsrat gewählt wurde. Norske Tre wollte ihn schon mehrmals rausschmeißen, weil er seine freigestellten Zeiten in der Kantine verbrachte. Greg erzählte gern von Vorladungen und Einschreiben und lachte sich kaputt. Sein Optimismus war verwunderlich, wenn man bedachte, unter welchen Umständen er lebte, ledig, hochverschuldet, er hatte nicht einmal den Führerschein. Letztes Silvester war er in Anzug und Cowboystiefeln aufgekreuzt, drei Kartons Mumm im Gepäck. Eine Kamikazeaktion, wenn man seine Finanzen bedachte. Greg juckte das nicht. Sein Vater war jung gestorben, Diabetiker, süchtig nach Paris-Brest. Er selbst soff recht ausgiebig und rauchte zwei Päckchen Camel am Tag. Man durfte das Leben nicht so ernst nehmen.

Christophe gab sich einen Ruck, fuhr los und suchte im Autoradio nach dem passenden Lied für die Fahrt. Wenn er so durch die vertrauten Straßen seiner Stadt fuhr, in der er die Jugend, die Liebe und jetzt auch das Älterwerden erlebt hatte, fand er es angenehm, sich von einem der seichten Oldies tragen zu lassen, die rauf und runter gespielt wurden. Die Straßen waren leer, die Laternen markierten seinen Weg, und langsam stiegen in ihm die großen Gefühle auf, die jene von Kindheit an ins Hirn gemeißelten Liedtexte weckten. Er ließ sich treiben. Johnny Hallyday, den er lange verachtet hatte, traf ihn heute ins Herz. Er sang von Schicksalsschlägen, zerstörten Existenzen, der Stadt, der Einsamkeit. Dem Verstreichen der Zeit. In der einen Hand das Lenkrad, in der anderen die E-Zigarette, so erlebte Christophe alles noch einmal, ein Mann allein mit seinen Erinnerungen. Die Bushaltestellen, an denen er seine halbe Kindheit beim Warten auf den Schulbus vergeudet hatte. Die alte Schule, die Dönerbuden, die wie Pilze aus dem Boden schossen, die Eishalle, wo er die beste Zeit seines Lebens hatte, die Brücken, von denen er in die Mosel spuckte, um sich die Langeweile zu vertreiben. Das Wettbüro, der McDonald’s und die leeren Tennisplätze, die dunkel daliegende Schwimmhalle, das langsame Gleiten in die Einfamiliensiedlungen, das Land, das Nichts.

An diesem Abend stieß er auf Les Lacs du Connemara und sah seine Mutter wieder vor sich, wie sie sonntagmorgens in ihrer geblümten Schürze Erbsen enthülste, im Radio dieses Lied von Michel Sardou, während er selbst eine Burg malte und draußen Frühling war. Dann die Hochzeit seiner Cousine, als er hinter den Festsaal gekotzt hatte, eine schlimme Krawatte um die Stirn gewickelt, colorent la terre, les lacs, les rivières. Sein Vater hatte ihn am nächsten Morgen abgeholt und ihn an der Ampel gefragt, ob er Achterbahn gefahren sei. Mit zwanzig dasselbe Tam tatam tatatatatam in einer Diskothek bei Charmes, Marlboro-Rauch und Charlie im rosa-blau erleuchteten Dunst, bevor es hinaus in die beißende Kälte auf den Parkplatz ging und über tödliche Schnellstraßen nach Hause. Zehn Jahre später im Bistro, sieben Uhr morgens, die gedämpfte Stimme des Sängers, als er am Tresen seinen Kaffee trank, schwere Müdigkeit unter den Augen, und er sich fragte, woher er die Energie nehmen sollte, auch diesen Tag noch zu bewältigen. Und mit vierzig schließlich, Heiligabend, er hatte den Kleinen schon bei seiner Mutter abgeladen, da skandierte die Stimme, autour des lacs c’est pour les vivants, und allein am Lenkrad wusste er weder, wo er essen sollte noch mit wem, so weit war es gekommen, die Haare spärlich, das Hemd spannte am Bauch, und in diesem Auto, das nicht einmal sein eigenes war, kam ihm plötzlich, als das Lied in seinem verheißungsvollen Heldenmut dahinleierte, eine weise Erkenntnis. Christophe dachte an die Frau, die er um jeden Preis hatte gewinnen wollen und die er verlassen hatte. An den Jungen, der alles für ihn war und für den er nie Zeit hatte. Das Gefühl von Verschwendung, Verdrossenheit, unmöglicher Wiedergutmachung. Das Leben ging aber weiter und mit ihm blieb die Hoffnung, obwohl er seine Tage zählen konnte wie die ersten grauen Haare. Es würden bessere Zeiten kommen. Man hatte es ihm versprochen.

Nicolas Mathieu: Connemara. Aus dem Französischen von Lena Müller und André Hansen. Hanser Berlin, 2022, S. 52–54.